ROUGE-BAISER

Il était une fois une jeune fille de la ville, la plus jolie qu’on eût pu voir. Sa mère en était folle, et sa mère-grand plus folle encore. Au point qu’en dépit de toutes les convenances, celle-ci lui fit faire une petite robe rouge si courte que l’on pouvait voir  la naissance de ses bas et si décolletée que sa gorge s’en trouvait ainsi joliment exposée. Le tout était complété pour une jolie cape en velours rouge qui lui seyait si bien, que partout on l’appelait Rouge Baiser.

Un jour, sa mère, ayant passé une commande au Deliveroo du coin pour le déjeuner, lui dit : Va voir comme se porte ta mère-grand, car j’ai vu sur Facebook qu’elle était malade. Porte-lui ces tacos bien garnis ainsi que ce sundae à la fraise car je sais qu’elle les adore.

Rouge baiser partit aussitôt pour aller chez sa mère-grand, qui demeurait dans un autre quartier. Sur le quai du métro elle rencontra un grand escogriffe qu’elle avait déjà croisé sur les réseaux sociaux et qui se nommait Werewolf. Celui-ci la trouva bien appétissante, mais il n’osa s’emparer d’elle à cause des nombreux passants alentour.

Il lui demanda où elle allait. La pauvrette, qui ne savait pas combien il est dangereux de s’arrêter et écouter un grand escogriffe croisé sur les réseaux sociaux, lui dit :

— Je vais voir ma Mère-grand, et lui porter ces tacos et ce sundae, que ma Mère lui envoie.

— Demeure-t-elle bien loin ? lui dit Werewolf.

— Oh ! oui, dit Rouge baiser, c’est par-delà le centre commercial que vous voyez tout là-bas, dans la première rue juste à droite.

— Eh bien, dit Werewolf, j’irais bien la voir aussi car je suis sûr qu’elle fait partie de mes contacts. Comme je suis garé juste à côté, je prends ma voiture pour m’y rendre pendant que tu prendras la prochaine rame. Au fait, connais-tu la nouvelle boutique « Little One » à la station suivante, il paraît que tout est à -70%.

L’escogriffe courut jusqu’à son coupé sport, sauta à l’intérieur et démarra pour se trouver coincé au premier feu rouge. Pendant ce temps, Rouge baiser avait tranquillement pris le métro qui n’avait que trois stations à parcourir avant d’arriver à destination. Malheureusement, lorsqu’elle remarqua la vitrine illuminée comme un sapin de Noël, elle oublia tout et sortit du wagon afin de courir après les bonnes affaires. 

L’escogriffe ne fut pas longtemps à arriver à la maison de la Mère-grand. Il sonne : Bzz, bzz.

— Qui est là ?

— C’est votre petite-fille Rouge Baiser, dit-il en contrefaisant sa voix. Je vous apporte des tacos et un sundae que ma Mère vous envoie.

La bonne Mère-grand, qui était dans son lit à cause d’un rhume carabiné lui répondit :

— Utilise la clef sous le paillasson !

— La clef ?

— Bien sûr, crois-tu donc qu’il faut tirer la chevillette pour que la bobinette choie.

Werewolf ouvrit la porte et se précipita sur la bonne femme dans son lit. Il lui suffit de quelques minutes pour la ligoter, la bâillonner et la jeter au fond d’un placard. Ensuite il ferma la porte, et alla se coucher dans le lit de la Mère-grand pour attendre Rouge baiser qui, quelque temps après, vint sonner à la porte. Bzz, Bzz.

— Qui est là ?

Rouge baiser eut un sursaut d’effroi en entendant la grosse voix de l’escogriffe mais sachant que sa Mère-grand était enrhumée, elle répondit :

— C’est votre petite-fille Rouge baiser, qui vous apporte des tacos bien garnis et un sundae à la fraise que ma Mère vous envoie.

Werewolf lui cria en adoucissant un peu sa voix :

— Utilise la clef sous le paillasson !

Puis, la voyant entrer, il lui dit en se cachant sous la couverture :

— Mets les tacos et le sundae dans le réfrigérateur et viens te coucher prés de moi.

Rouge baiser se déshabille, et va se mettre dans le lit, où elle fut bien étonnée de voir comment sa Mère-grand était faite en petite tenue. Elle lui dit :

— Ma mère-grand, que vous avez de grands bras ?

— C’est pour mieux t’embrasser, ma petite.

— Ma mère-grand, que vous avez de grandes jambes ?

— C’est pour mieux courir, ma petite.

— Ma mère-grand, que vous êtes velue ?

— C’est pour mieux te faire frissonner, ma petite.

— Ma mère-grand, que votre menton pique ?

— C’est pour mieux te râper, ma petite.

— Ma mère-grand, c’est vraiment trop dur !!!

— C’est pour mieux profiter. Et en disant ces mots, le méchant escogriffe se jeta sur Rouge baiser et n’en fit qu’une bouchée.

Moralité

On voit ici que de jeunes filles,

Douces, bien faites et gentilles,

Donnent un peu trop facilement,

Leur confiance à tout venant.

 

Et ce n’est pas chose étrange,

Que les vilains escogriffes,

Sur les réseaux sociaux

Et dans la vraie vie,

Etalent leurs déviances.

 

Ne vous laissez pas avoir

Par des loups de comptoir

Qui ne penseront qu’à une chose,

Vous faire votre fête,

Mais sachez reconnaître

Le vrai du faux

Vous vous en sortirez ainsi, sans bobo.

4 thoughts on “ROUGE-BAISER”

  1. Ah ah ah j’adore ! N’abandonne jamais ta plume ma Nath.
    A quand un recueil papier de tous tes écrits ? Pour le plaisir du livre que l’on peut manipuler, pour le plaisir du livre dont on peut sentir le papier.

    Bisous

  2. Très joliment réadapté à notre époque 🤗 merci Nath ❤️ et continue , ne change pas, reste la même, reste toi!🫶

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